Pour le rhinocéros, qui fait partie des espèces de mammifère en grand danger d'extinction, le salut viendra peut-être du ciel. Deux sociétés, Sigfox et Eutelsat, se sont associées pour lutter contre le braconnage de ce grand herbivore. Marion Moreau, présidente de la fondation Sigfox, et Nicolas Baravalle, d'Eutelsat, nous expliquent comment l’Internet des objets et les satellites vont permettre sa surveillance.

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    Aujourd'hui, de nombreuses espèces animales sont menacées ou en voie de disparition. C'est particulièrement vrai pour les plus gros herbivores, amenés à disparaître ces prochaines décennies. Aujourd'hui, dans la famille des rhinocérotidés, il ne reste que cinq espèces dans le monde (deux en Afrique et trois en Asie). Le rhinocéros blanc du Nord (une sous-espèce), par exemple, est au bord de l'extinction complète.

    Comme le souligne le WWF, presque toutes les espèces de rhinocéros sont menacées de disparition. Il resterait seulement 27.000 individus, contre 70.000 il y a cinquante ans. Les scientifiques s'accordent à dire que si rien n'est fait, les rhinocéros auront disparu dans moins de 10 ans. Auparavant, la principale menace était la destruction de son habitat naturel mais aujourd'hui, le braconnage est devenue la première cause du déclin des populations de ce mammifèremammifère, un des plus massifs des terresterres émergées. Pourquoi ? Pour leurs cornes. Vendues en Chine et au Vietnam, elles sont consommées sous forme de poudre à des fins médicinales.

    Pour lutter contre cette chasse, la société Sigfox, spécialiste des objets connectés, s'est investie dans le projet Now Rhinos Speak, réalisé en partenariat avec trois grandes organisations internationales dédiées à la conservation de cette espèce : International Rhino Foundation, Save The Rhino et Lowveld Rhino Trust.

    Installation d’un capteur GPS dans la corne du rhinocéros, à l'intérieur d'un trou percé puis recouvert de résine. Seule dépasse l'extrémité de l'antenne. © <em>Sigfox Foundation</em>

    Installation d’un capteur GPS dans la corne du rhinocéros, à l'intérieur d'un trou percé puis recouvert de résine. Seule dépasse l'extrémité de l'antenne. © Sigfox Foundation

    L'Internet des objets et un réseau à bas débit pour surveiller les rhinocéros

    La fondation Sigfox a « conçu et mis en place une solution de suivi à distance de rhinocéros évoluant dans leur environnement naturel », nous explique Marion Moreau, présidente de la Sigfox Foundation. Le service se fonde sur le réseau à très bas débitdébit de Sigfox qui conçu pour l'Internet des objets (IoT, pour Internet of thingsInternet of things)). Un tel réseau permet de « transmettre des petits messages sur de très grandes distances » et d'utiliser un capteurcapteur à bas coût. « Pour moins de 40 euros pour 4 années d'utilisation », ce capteur de très petite taille « est logé dans la corne du rhinocéros ». Il ne gêne pas l'animal (lequel ne supporte pas les colliers) et consomme très peu. « Il a une duréedurée de vie de 4 ans et envoie trois fois par jour la position GPSGPS de l'animal connecté ». Le reste du temps, il est en veille.

    Actuellement, « une dizaine de rhinocéros sauvages sont suivis dans le cadre de cette opération ». Cette première expérience a démarré il y a plus de 400 jours, entre juillet 2016 et février 2017, dans une « réserve africaine, dont la localisation est tenue secrète pour ne pas alerter les braconniers ».

    Cette expérience s'est révélée concluante. La mise en place de ce dispositif a « permis d'améliorer l'identification des zones de vigilance, ainsi qu'une meilleure allocation des moyens dédiés à la protection sur le terrain ». Aujourd'hui, la Sigfox Foundation se donne trois ans pour « équiper 3.000 rhinocéros avec le concours d'Eutelsat » qui s'engage à « accompagner ce déploiement des ressources satellitaires nécessaires ».

    Exemple d’installation hybride entre le SmartLNB d’Eutelsat et le réseau Sigfox. © Eutelsat, <em>Sigfox Foundation</em>

    Exemple d’installation hybride entre le SmartLNB d’Eutelsat et le réseau Sigfox. © Eutelsat, Sigfox Foundation

    Le satellite pourrait protéger d'autres espèces

    Pour le moment, « seules des données GPS sont transmises avec l'historique de déplacement de chaque rhinocéros connecté ». À terme, la Sigfox Foundation souhaite « améliorer le capteur et lui donner de nouvelles fonctions ». Par exemple, l'utilisation d'accéléromètresaccéléromètres donnera des informations sur « le comportement des rhinocéros dans leur milieu naturel », ce qui améliorera dans le même temps la compréhension de l'espèce.

    D'autres voies d'amélioration sont à l'étude, comme des capteurs d'intrusion, de localisation et d'autres liés au comportement de l'animal. Cependant, la Sigfox Foundation ne parle pas de ces évolutions futures « pour ne pas renseigner les braconniers et donc mieux protéger ces rhinocéros ». Il est aussi envisagé d'adapter ces capteurs à d'autres espèces menacées par le braconnage ou en voie et danger de disparition, comme les éléphants, avec d'autres paramètres mesurés, comme par exemple la fréquence cardiaque.

    Ces données de géolocalisation des rhinocéros seront rapatriées par « les ressources satellitaires d'Eutelsat sur une plateforme en ligne sécurisée », nous explique Nicolas Baravalle, directeur de la région Afrique subsaharienne chez Eutelsat. Partenaire du projet, l'opérateur européen fournira « les capacités en bande Ku nécessaires sur un de nos satellites géostationnairessatellites géostationnaires en couverture de la région concernée », en l'occurrence le service satellitaire SmartLNB, qui « permet d'étendre les réseaux IoT terrestres partout, au-delà des zones urbaines ». Concrètement, « nous avons mis en place trois antennes de 90 cm qui reçoivent les signaux des capteurs des rhinocéros, qui transitent sur le réseau à bas débit de Sigfox ». Ces données sont relayées au téléport de Paris-Rambouillet sur une « plateforme en ligne sécurisée d'où les gardes des réserves, vétérinairesvétérinaires et spécialistes de l'espèce, accèdent aux relevés des trajets des animaux effectués trois fois par jour ».